Oxmo Puccino, L’Arme de paix

13 04 2009

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L’Arme de paix fait figure de coming-out variétoche. Oxmo Puccino louchait secrètement sur la variété depuis une décennie. Mais jusqu’ici, comme un grand gaillard gauche étouffé par la timidité, il semblait hésiter avant de franchir le pas. Après L’Amour est mort, aux accents variété, il était revenu dans les clous avec Cactus de Sibérie. Pareil après le jazzy Lipopette bar. Le 23 mars dernier, Oxmo s’est définitivement jeté dans le bain.

L’Arme de paix est un album Potemkine. Séduisant à la première écoute, il sonne désespérément creux pour peu qu’on insiste. Bien sûr, Oxmo Puccino n’a pas perdu en route son talent d’écriture, si bien que certains morceaux sont foutrement bien ficelés. Le problème : Oxmo Puccino n’a plus grand-chose à dire. Et il le confesse volontiers : « Je ne fais plus des chansons qui font état de mon quotidien, parce que mon quotidien a changé et qu’il est peut-être moins intéressant qu’avant. » (1)

Alors, le black mafioso puise son inspiration ailleurs. En cherchant l’universel, il dérape souvent vers la banalité. Les grandes considérations sur la vie et ses tracas succèdent aux truismes éculés. A force de tourner à vide, l’écriture d’Oxmo au lyrisme mièvre paraît vaine. Résultat : L’Arme de paix manque de muscle. La musique dépouillée des Jazzbastards et les finitions de Renaud Létang remplissent leur contrat. Sans plus. Oxmo lui-même a perdu le coffre qui faisait le charme de sa voix caverneuse.

Le cinquième album d’Oxmo est une nouvelle manifestation du complexe d’infériorité dont souffre le rap français. Nos MCs nationaux donnent souvent l’impression d’avoir intégré l’idée que le rap est une sous-musique. A commencer par Oxmo Puccino, en dépit de ses dénégations –« le rap, une sous-culture, mais quelle idée ! Ce sont des propos de fils de canidé ». A telle enseigne qu’ils ont souvent tendance à lorgner la respectabilité du côté de la variété. Kery James, cherchant l’adoubement de Charles Aznavour, illustre jusqu’à la caricature ce besoin pathétique de reconnaissance. A vouloir faire du rap une musique de notable, on perd de vue son essence infâme. Chez Oxmo Puccino, l’hommage rendu à Jacques Brel vire au sacrilège tant le morceau est raté.

On n’attend pas du black desperado un deuxième Opéra Puccino –d’ailleurs son chef d’œuvre est peut-être son deuxième opus, L’Amour est mort. On aimerait simplement qu’Oxmo exploite à fond le talent qu’il ne laisse entrevoir que par intermittence.

(1) Interview pour le site Rap2france